La tache

Une tache récalcitrante, impossible d’en venir à bout. Un embêtement bien bénin pour lequel je délivre pourtant une énergie considérable. J’ai essayé l’eau chaude, le savon de Marseille, la lessive et le détergent, rien n’y fait. J’ai aussi pensé qu’une tache sur un habit est un peu l’équivalence inverse d’un trou. La gêne est semblable en moins définitif. Mais le trou est raccommodable alors que la tache n’est qu’effaçable. En principe. Parce que si certaines taches simples s’en vont avec un peu d’eau, certains trous d’usure ont les abords trop fragilisés pour êtres cousus. Sans parler des accrocs. Puis le jus de citron, le fer à repasser, le sel, le diluant à peinture, le chaud du four et le froid du congélateur, le bicarbonate et même le sable. Et tout à coup, j’ai la main heureuse. PAF. La tache a été avalée net par… mais peu importe. Avez-vous entendu le bruit qu’elle a fait ? PAF. La tache a fait PAF et elle a disparu. Où est-elle ? Je ne l’ai même pas vu partir tant son départ a été instantané. PAF. Et il ne reste rien sur mon chiffon. D’un coup d’un seul, évanouie la tache, évaporée. PAF. Je repense à mon trou. C’est quand même bien plus simple un trou, ça ne fait aucun bruit, c’est l’absence en silence. Le néant. Ma tache y est retournée. PAF. Et seul son cri résonne en moi.